« Ruby ? » L’homme venait de se réveiller en sursaut. Comme souvent, le soigneur s’était endormi au sol, à la belle étoile et il laissait les sons extérieurs le sortir de son réveil aux petites lueurs du matin. Cette fois-ci, ça avait été un cri de Ruby. Ça lui avait semblé si soudain et de venir de tellement loin. Kayden s’était redressé à toute vitesse et il observait autour de lui à la recherche de son Pokémon. Il n’était pas là. Ça ne lui ressemblait pas. Ruby était très paresseux le matin et il était souvent le dernier de ses Pokémons à se réveiller. « Tu l’as vu ? » demanda l’homme à l’endroit de la Goupix de sa fille. Amber semblait tout aussi perdu que son propriétaire alors qu’elle venait d’être réveillée par Kayden. Sans tarder davantage, Kayden attrapa son sac à dos qu’il mit sur l’une de ses épaules avant de s’éloigner à la recherche de son Nidorino. « Ruby ? » Les sourcils froncés, l’homme avançait dans la forêt sans retrouver la trace de son Pokémon qui ne faisait plus aucun bruit. Kayden était persuadé de l’avoir entendu hurler dans son sommeil, mais ça n’avait rien à voir avec un cri de détresse. « Où es-tu ? » demanda l’homme se fichant d’attirer l’attention. De toute manière, à cette heure, il était sûrement seul dans cette forêt n’est-ce pas ? Du moins c’est l’impression qu’il avait. Il ne voyait personne, ni aucun Pokémon. Est-ce que tout le monde dormait encore ? Possible. Kay’ perdait facilement la notion du temps depuis qu’il était à Lathea. Il connaissait la date, mais il ne savait pas le jour de la semaine.

Un nouveau cri provenant de son Pokémon violet attira son attention. Encore une fois, il ne semblait pas en détresse. Il donnait même l’impression de s’amuser. Quelle mouche l’avait piqué ? Ruby était généralement en quête de nourriture ou de combat. Le reste ne l’intéressait pas. « Vas-y. » dit l’homme en faisant un signe de tête à sa Goupix qui semblait mourir d’envie de rejoindre son ami. Le duo se dirigea vers la plage où se trouvait son Pokémon qui s’amusait près de l’eau. Il poussait des petits cris en tapant ses pattes avants dans l’eau. La vue était presque mignonne. Il fut rejoint par Amber qui entreprit le même jeu que lui. Ils semblaient être en train de jouer avec un Pokémon dans l’eau que Kayden n’arrivait pas à reconnaître de lui. Sans perdre une seconde de plus, l’homme descendit la petite colline sur la pointe des pieds afin de rejoindre la plage à son tour. Tellement concentré sur ses Pokémon, il n’avait pas remarqué qu’il était suivi. Un peu dans sa bulle et dans ses problèmes, Kay’ n’était pas aussi attentif qu’avant. « À quoi vous jouez ? » demanda-t-il à l’endroit de ses partenaires. Ruby se tourna vers lui et il éclaboussa les jambes de son dresseur. « Oh! Tu veux jouer à ça ? » Kay’ rit et il se laissa tomber sur les genoux pour se saisir de son Pokémon qu’il fit tourner sur le dos afin de la chatouiller sur le ventre. Tout ça devant les regards indiscrets de la personne qui la suivait et du Pokémon sauvage dans l’eau.

Malgré la situation dramatique, Kayden arrivait de temps en temps à se détendre suffisamment pour profiter de la présence de ses Pokémon autour de lui. C’était la première fois qu’il en possédait et il regrettait de ne pas avoir eu le courage de se lancer dans cette aventure avant. Il avait choisi de mener sa vie autrement et il avait profité des Pokémons de Callie. Ça avait toujours comblé ce vide chez lui. Il avait investi tout son temps et son énergie dans l’éducation de son enfant et pour lui partager ses nombreuses connaissances sur les Pokémon. Aujourd’hui, il était seul et ce vide lui avait sûrement créé ce besoin d’avoir ses propres Pokémons. La plupart qu’il possédait, il n’avait pas cherché à les posséder. On lui avait fait confiance, on l’avait suivi et ces Pokémons étaient toujours à ses côtés aujourd’hui. Jamais Kayden ne les aurait forcés à quoi que ce soit. C’était leur choix et ça le serait toujours. Si l’un de ses Pokémon lui partageait un jour son envie de partir pour de nouvelles aventures, Kay’ n’allait pas le retenir. Certes, ça allait l’attrister, car il s’était attaché, mais il saurait comprendre. Pour l’instant, ce n’était pas dans l’air. Tout le monde semblait à sa place à ses côtés et ils avaient l’air heureux. Ruby, allongé dans le sable, en était la preuve. Ce Pokémon plus rude, plus sérieux arrivait à se détendre complètement avec Kay’ au point d’avoir un côté joueur que le soigneur n’aurait jamais soupçonné.

Son Pokémon tâchait de se débattre pour échapper aux mains de son dresseur, mais toujours dans une ambiance bonne enfant. Si Ruby avait vraiment voulu à s’éloigner, il aurait pu. Il n’était pas prisonnier. C’était qu’un Pokémon qui profitait de l’amour que son dresseur lui donnait. Sauf que leur petit moment fut interrompu par une voix. L’homme haussa un seul sourcil avant de se retourner pour croiser le regard dans la femme qui venait de s’approcher de lui. Peut-être qu’il aurait dû être gêné voire même avoir honte à son âge de se retrouver dans la sable en train de jouer avec son Pokémon, mais pas du tout. Il s’assumait complètement. C’est pour cette raison qu’il ne chercha pas à se lever et qu’il s’installa plutôt en tailleur dans le sable chaud de la plage afin de faire face à l’inconnue. « Comme toute personne qui possède des Pokémon. Je l’espère du moins. » fut la première réponse que donna l’homme à la femme qui avait affirmé qu’il aimait son Pokémon. L’homme était contre la maltraitance, ce fut une réponse presque naturelle pour lui. Il savait que ce n’était pas le cas, mais il espérait tellement que tous les Pokémons soient aimés et bien traité.

La conversation aurait pu bien se dérouler si la brunette n’avait pas continué en prononçant son nom tout en affirmant qu’elle aimerait lui parler. Sans chercher à se cacher, le visage du soigneur se ferma et ses bras se croisèrent naturellement sur son torse. Elle savait exactement qui il était. Sa présence ici n’avait rien d’un hasard, Kay’ en était persuadé. Il aurait pu se lever et partir sans rien ajouter, mais il n’en fit rien. Il resta installé dans le sable, la tête levée vers la femme debout. Dans un premier temps, le Weaver ne dit rien et il laissa la femme se présenter ainsi que de préciser la raison de sa présence à ses côtés. Myrtha. Kayden serra les dents et il haussa les épaules avant de pointer une place dans la sable devant lui. « Je crains ne pas avoir beaucoup de réponses à vous donner, mais je vous écoute. » Au fond, il était curieux. Il ne connaissait pas toutes les démarches de la scientifique, mais elle avait eu le courage de se présenter à lui, il n’allait pas la renvoyer comme cela. Il ne promettait pas de réponses, mais il allait l’écouter. « Je suppose que si vous savez qui je suis, vous savez également que ça fait plus de trente ans que je n’ai pas mis les pieds ici. Encore moins à Myrtha. » ajouta-t-il avec une certaine condescendance qui ne lui ressemblait pas. Il était actuellement sur la défense et Amber le sentit, car elle vient se positionner très près de son propriétaire.

Kayden regrettait souvent de porter le nom qu’il avait. Avec sa sœur, ils auraient dû en changer d’un commun accord. Peut-être que leur vie aujourd’hui serait plus tranquille. Depuis son retour dans cette région, Kayden se faisait apostropher régulièrement par rapport à son nom et ses origines. Même trente ans sur une autre île n’avaient pas suffi à se faire oublier. « Ai-je le choix ? » souffla-t-il plus pour lui-même lorsqu’elle lui demanda si elle pouvait le questionner sur sa famille. Elle pouvait. Kayden ne garantissait aucune réponse.

Les doigts se Kayden se refermèrent dans le sable sous la légère colère qui pouvait monter de se faire renvoyer plus de trente ans en arrière dans une vie qu’il avait détesté et qu’il détestait toujours aujourd’hui. L’homme laissa la femme parler et lui poser différentes questions. À aucun moment, il ne la coupa pour répondre et sa tête se pencha légèrement sur le côté lorsqu’elle lui confia ne pas être à l’aise avec l’eau. Si la situation avait plu à Kayden, il aurait été le premier à lui proposer de s’éloigner et d’aller ailleurs, mais elle était venue vers lui, il n’allait pas bouger. « Vous croyez vraiment pouvoir découvrir cette vérité que tout le monde cherche à avoir depuis 10 ans ? J’ai l’impression qu’elle a disparu en même temps que Myrtha. » Il haussa les épaules. Chacun ses buts dans la vie après tout. Pouvait-il vraiment la juger alors qu’il continuait de croire que sa fille était en vie, quelque part sur cette île ? Même après autant de temps. « Les Weaver ont énormément de défauts, mais je ne crois pas qu’ils soient responsables de cette catastrophe. Du moins, pas volontairement. Les Weaver ont toujours été avides de pouvoir et de contrôle. Perdre entièrement une ville était le pire qui pouvait leur arriver à eux et à leur régime à la noix. » Kayden aurait pu ne rien dire du tout, il aurait pu demander à la femme de partir et clore la discussion directement. Sauf que lui, il n’était pas comme les autres Weaver. Il avait ses secrets à cacher, mais ce n’était pas du même niveau que son frère ou ses parents. « Mon avis sur ma famille se résumera par le fait qu’ils m’ont poussé à fuir Lathea. Si j’étais resté, je n’aurais jamais eu l’occasion de respirer par moi-même. Ils pensent que leur régime et leur façon de faire est la meilleure. Si vous osez penser le contraire, ils vous chasseront. » Il haussa les épaules. Ce n’était pas exactement ce qui s’était passé, mais Kay’ l’avait toujours perçu comme cela. S’il avait été du même avis que ses parents et de son grand frère, il n’aurait jamais eu toute la pression qu’il avait sur les épaules. « Il y a beaucoup plus beau que Lathea a découvrir. À aucun moment, je ne regrette d’être partie. » Au fond, il serait peut-être partie de lui-même. Sauf qu’il n’aurait pas eu besoin de se cacher et de vivre un stress constant d’être retrouvé. Il était devenu complètement paranoïaque dans ses premières années d’exil. Il ne savait même pas s’il avait été poursuivi, mais il n’avait pas pris le risque de se poser avant longtemps.

Kayden s’était contenté de sourire légèrement lorsqu’elle avait affirmé qu’il avait le choix. Pourtant, il avait l’impression qu’elle n’allait pas partir aussi facile si jamais il refusait de répondre à ses questions. Peu importe, il avait accepté même s’il savait très bien qu’il ne pourrait faire grand-chose pour elle. Kay’ était parti depuis beaucoup trop longtemps pour savoir. Il n’avait aucune nouvelle et il n’avait pas cherché à en avoir. Certes, sa jumelle était l’exception, mais ils ne parlaient pas de leur famille. Ils parlaient d’eux. Parce que le reste ne les intéressait pas. Le sujet familial avait été banni bien avant la fuite de Kay’, le duo préférait concentrer son énergie sur des causes qui en valaient réellement la peine. Kayden n’avait pas beaucoup de connaissances en science et il se permit de demander à la femme si elle pensait vraiment pouvoir trouver quelque chose près de 10 ans plus tard. De son point de vue très externe et éloigné, il avait l’impression que tout avait disparu. Cléora voyait les choses différemment et elle ne tarda pas à le faire comprendre au plus jeune Weaver. Ce dernier hocha lentement lorsqu’elle termina. « Je vois. Je vois également que vous êtes très passionnée par votre travail et par vos recherches. Même si je ne pense pas être la personne la mieux placée pour vous aider, je vous souhaite de trouver ce que vous souhaitez. » Malgré son ton plus froid des minutes précédentes, Kayden n’avait aucune raison de souhaiter un échec à cette femme. Si, en plus, sa famille était impliquée dans cette histoire – même si l’homme ne le croyait pas – et qu’elle se faisait arrêter, il serait le premier satisfait. Peut-être que ça allait leur permettre de réaliser comment ils ont fait du mal autour d’eux avec leur régime à la con.

Satisfait de la réponse obtenue, l’homme se permit une légèrement ouverte à la scientifique. Même s’il détestait sa famille, il n’était pas prêt à les accuser. Selon-lui, sa famille tenait trop au pouvoir pour avoir souhaité cette catastrophe. Ensuite, un accident était toujours possible. Le visage de Kayden se referma immédiatement lorsque Cléora lui demanda pourquoi il était revenu. Il la toisa un moment avant que son regard ne la quitte pour se perdre vers la mer. La seconde question ne tarda pas et c’était une bonne question… Est-ce qu’il avait peur que sa famille s’en prenne à lui ? Peut-être… En fait… Oui. Il avait sûrement une crainte au plus profond de lui sinon l’homme ne tâcherait pas à se cacher autant. Il n’avait même pas annoncé son retour à sa jumelle. Il n’avait même pas osé lui parler de l’enlèvement de Calliope. Pas par manque de confiance, mais par paranoïa. La réponse à la question de Cléora était « oui », mais il n’était pas prêt à le formuler comme cela. « Ma famille n’aurait aucune raison de s’en prendre à moi maintenant. Ils n’y gagneraient rien. » Ça ne répondait pas vraiment à la question de la peur, mais peu importe. C’était sa réponse. « Tant qu’à la raison de mon retour… J’ai l’impression que vous avez déjà votre idée sur la question n’est-ce pas ? Ça fait 30 ans que je n’ai pas mis les pieds dans cette région, 30 ans et pourtant vous m’avez abordé en sachant pertinemment qui je suis. » Ça, c’était quelque chose qui l’intriguait énormément. Et poser cette question était également une manière pour lui de détourner la véritable question. Il ne voulait pas parler de la raison de son retour et il espérait que la scientifique n’en savait rien. Mais si elle le connaissait autant qu’il pouvait le penser, elle avait sûrement des informations que le brun ne voulait pas donner. « Est-ce que vous m’avez fait suivre Miss Situ ? » Son ton était maintenant plus sévère alors qu’il retournait la tête pour plonger à nouveau son regard dans le sien. Il pouvait répondre à certaines de ses questions, mais elle devait s’attendre à devoir répondre aux siennes. Elle devait être une gamine lorsqu’il était partie, elle ne pouvait pas l’avoir reconnu par « hasard ». Il y avait quelque chose derrière cette rencontre de si bon matin.

Ses dents s’étaient serrées ensemble sans qu’il ne le remarque. Si sa pensée était valide, ça voulait dire que la jeune femme ici présente avait fait ses recherches et qu’elle avait fouillé dans les actualités d’Alola. La disparation de Callie n’était pas passée sous silence tout comme l’attaque de l’Auberge. Aujourd’hui, Kay’ ne pourrait même pas dire ce que cette auberge était devenue. Il avait tout quitté pour partir à la recherche de sa fille. Il osait espérer que ses partenaires d’affaire avaient su se remonter sans lui. Il aurait peut-être dû prendre du temps pour s’informer, pour prendre des nouvelles, mais Calliope était son unique objectif depuis près de deux ans maintenant. Deux années horribles où il angoissait jour et nuit à la recherche de son enfant. Le tout, sans piste réellement solide.

L’homme ferma doucement les yeux lorsque Cléora entreprit son monologue. Elle lui confia d’abord qu’elle se débrouillait par tous les moyens pour avoir les réponses à ses questions avant d’ajouter qu’elle était une mère également. La gorge de Kayden se serra et son cœur commença à battre plus fort dans sa poitrine. Les yeux toujours clos, il se surprit à retenir sa respiration lorsque Cléo’ ajouta qu’elle ferait tout pour retrouver sa propre fille si elle disparaissait. Kayden était partagé entre le colère de savoir que son intimité avait été violée et la peine – toujours présente – de la disparition de sa fille. Il aurait pu s’énerver contre la scientifique, il aurait pu se lever et partir, mais il n’en fit rien. Il resta là, les yeux fermés afin d’empêcher les larmes de couler. L’homme laissa la femme parler. Pendant Amber vint le rejoindre pour s’installer sur ses cuisses tout en observant l’inconnue qui parlait de sa dresseuse. La main de Kayden se perdit, par réflexe, dans son pelage. Lorsque la femme eut terminé de parler, Kay’ avait revenu une seule chose de ses paroles. La chose, selon-lui, la plus importante. C’est d’une petite voix, d’un ton blessé qu’il demanda : « Vous l’avez cherché…? » Et même si la scientifique n’avait rien trouvé, le geste était là et ça touchait davantage Kayden qu’il aurait pu le croire. C’est un regard larmoyant qui s’était posé dans celui de Cléora. Elle ne pourrait pas le croire s’il faisait comme si cette histoire ne l’affectait pas. « Si vous m’avez fait espionner, si vous avez réussi à me trouver, ça veut dire que vous n’êtes peut-être pas la seule. L’unique indice sur sa disparition que j’ai réussi à avoir m’a conduit ici. Je ne crois pas que ça soit un hasard. » L’homme ne s’était pas ouvert souvent sur la question. Il avait fait des nombreuses théories, mais ses Pokémon étaient les seuls au courant. Même Angie n’en savait rien, elle faisait partie des personnes que Kayden avait tenu loin de lui… En fait, il avait tenu tout le monde loin de lui. Il ne pourrait pas expliquer totalement pourquoi. Il avait la sensation que la vie de Callie serait davantage en danger si on savait qu’il était sur ses traces. Il avançait dans l’ombre et à tâtons depuis. « Alors oui, c’est l’unique raison de mon retour. Retrouver ma fille et une fois que ça serait fait, nous allons repartir. Alola est notre maison. » C’est ce qu’il espérait tellement, mais plus le temps avançait et plus il avait l’impression que rien n’allait se passer comme prévu. Le fait que sa famille puisse s’en prendre en lui ne lui faisait pas peur. C’était le fait qu’on puisse s’en prendre à sa fille tout simplement, car elle avait eu le malheur de porter son nom de famille. Kayden allait vraiment finir par regretter de ne pas l’avoir changé. « Par contre, je vous conseille de faire attention Miss Situ. Si personne ne veut parler des Weaver ce n’est pas sans raison. Je comprends votre besoin d’avoir des réponses à vos questions, mais ça ne vaut pas la peine de se mettre en danger. Ils ne sont plus au pouvoir et c’est la seule chose qui devrait vous préoccuper. Je ne sais pas si ce régime Gaïa est vraiment la meilleure solution, mais ça fonctionne. » Il se doutait bien que ça ne changerait rien. Il voyait au regard de la femme qu’elle était motivée et qu’elle était prête à creuser. « Plus vous resterez loin de ma famille et mieux ça sera. » Il parlait par expérience. Les 30 ans loin de Lathea avait été les meilleures pour lui. Il avait pu connaître la vie sans souci et sans tracas. « J’ai bien peur que vous ayez perdu davantage de temps à me faire suivre et à vous introduire dans ma vie privée. Je n’ai rien à vous offrir. Ce n’est pas moi qui peux faire tomber les Weaver comme vous le voudriez ou qui peux vous éclairer sur les événements de Myrtha. La seule chose qui m’a réellement préoccupé après l’explosion ce fut ma sœur et ses proches. » Et si Cléora était informée autant qu’elle le prétendait, elle savait que sa jumelle avait perdu son époux lors de cette catastrophe.

Dans le cas inverse, Kayden aurait aidé n’importe qui. Il était d’un naturel altruiste, mais il avait beaucoup de mal à demander de l’aide. Ce qui l’avait poussé à chercher Callie de lui-même après que la police d’Alola ait arrêté ses recherches pour des motifs bidons. Plus Kayden y réfléchissait et plus il avait l’impression que des pots-de-vin avaient été échangés pour tenir cette histoire sous silence. Kay’ avait été laissé à lui-même et il avait décidé de rester seul dans cette histoire. Il aurait dû en parler avec Angie dès le départ, il le savait, mais le père de famille avait eu une grande phase de déni. Moins il en parlait, moins les événements s’étaient produits. C’était une mentalité stupide, il le savait, mais ça l’avait empêché de devenir fou. S’il tenait debout depuis longtemps, c’était parce qu’il avait empêché cette histoire de réellement l’affecter. « On se comprend dans ce cas… » souffla le médecin. Elle était parent, elle pouvait comprendre les maux de Kayden. « Je l’espère aussi. » Indemne, il ne savait pas. Si physiquement elle allait bien, il craignait le traumatisme que les deux années précédentes allaient lui avoir causé. « Je sais qu’elle est toujours vivante. » On pourrait croire qu’il disait ça par refus de penser au pire, mais il savait que sa fille était toujours en vie. Sa rencontre avec Heathcliff lui avait permis d’échanger avec sa femme qui lui avait confirmé que Callie n’était pas avec elle. Donc Calliope n’était pas morte. Kayden faisait confiance à ce médium. Et pour avoir vécu cet échange particulier avec son épouse, il savait que c’était elle et qu’il n’avait pas été mené en bateau pour un peu d’argent.

Même si le ton sévère du Weaver pouvait sonner comme des menaces, ce n’était pas le cas. C’était une véritable mise en garde, car il savait que sa famille était dangereuse et pour lui, ça ne valait pas la peine de se mettre en danger. Il avait la sensation que la femme n’allait pas le prendre au sérieux, mais au moins, il pourrait se dire après coup qu’il avait essayé. Si la scientifique voulait en faire qu’à sa tête par la suite, ça ne serait pas sa faute. « Oui, il vaut mieux éviter au maximum de lui parler de cette histoire. Tous ceux qui ont perdu souhaitent uniquement tourner la page et essayer d’avancer. » Angarad n’était pas la seule à avoir vécu l’enfer et Kayden détestait le fait qu’elle puisse être associée à cette histoire seulement parce qu’elle avait eu le malheur d’être née dans la mauvaise famille. Tout comme lui. On lui posait des questions sur un événement alors qu’il n’était même pas présent dans la région depuis plus de 20 ans au moment des faits. Les gens étaient prêts à imaginer n’importe quoi dans l’espoir d’avancer sur ce mystère. « Merci Miss Situ, j’apprécie, mais ne vous inquiétez pas pour moi, je n’ai besoin de rien. » Il ne voulait pas d’aide. Il n’était pas certain qu’on puisse réellement l’aider. « J’espère que vos recherches scientifiques pourront vous mener aux réponses que vous cherchez, et sans vous mettre en danger. Je me répète, mais ça ne vaut pas la peine. Certains mystères sont mieux où ils sont. » Il haussa les épaules. Il était peut-être trop détaché de cette histoire pour en voir le véritable intérêt. L’homme offrit un léger sourire à la femme avant de se reconcentrer sur ses Pokémons. Elle pouvait partir si elle le désirait, et si elle n’avait pas d’autres questions. Lui n’allait pas bouger d’ici.